Mary Lou Malig

(Cet article a été publié pour la première fois sur le site de l’organisation Focus on the Global South sous le titre «Destroy and Profit: Wars, Disasters and Corporations». Le rapport peut être téléchargé à cette adresse: http://focusweb.org/content/view/819/30/)

Ces derniers mois tous les regards se sont fixés sur les résultats de la 6e  conférence ministérielle de l’OMC à Hong Kong. En jeu : le sort du round de Doha sur le développement.
Des milliers de manifestants de tous horizons et de toutes organisations de par le monde ont envahi les rues de la ville  afin d’empêcher la signature d’un mauvais accord. Cependant les grandes puissances commerciales savaient qu’elles ne pouvaient pas s’offrir un autre Seattle ou un autre Cancùn, et c’est la raison pour laquelle les USA et l’Union Européenne, avec l’aide de l’Inde et du Brésil ont sauvé le round par un accord qui sera préjudiciable à la majorité des peoples de la Terre. Ce mauvais accord, dont le contenu est pour la plus grande part rejeté par les peuples,  sera bientôt appliqué à l’Irak, si ce n’est déjà le cas.

Bienvenue au club

On ignore généralement que l’Irak s’apprête à rejoindre l’OMC en tant que membre à part entière puisque le pays a atteint le stade 3 du processus d’adhésion qui précède l’adhésion complete, alors que la majorité des Irakiens ignore jusqu’à son existence.
Le 11 février 2004, moins d’un an après l’invasion américaine du pays, l’Irak s’était vu attribuer le statut d’observateur au sein de l’OMC. Quatre mois avant que les USA n’acccordent la « souveraineté » au gouvernement provisoire irakien, le territoire occupé avait déjà franchi le premier pas pour rejoindre l’OMC.

Selon une publication commerciale, « Les analystes de Genève ont été surpris par la rapidité de la manœuvre »  « je pensais qu’ils attendraient que l’Irak soit plus stable » (1) Même Ahmad Al-Mukhtar, directeur général des relations économiques extérieures au ministère irakien du commerce, avait signalé l’instabilité du pays : « Comme vous le savez, mon pays traverse actuellement une période très délicate. Nous sommes en pleine instabilité ». (2)
Malgré son instabilité, l’Irak a bénéficié d’un soutien suffisant pour être accueilli à l’unanimité, et du premier coup, au sein du conseil général de l’OMC Au cours du même conseil, l’Iran qui sollicitait un statut d’observateur depuis 3 ans a vu sa demande rejetée pour la quinzième fois par un vote négatif des USA (3).

Le succès des USA en faveur de l’accession de l’Irak est tel que les membres de l’OMC et le secrétariat n’ont pas vu que le pays ne répondait pas à la première condition de l’accession, puisqu’aux termes du réglement de l’OMC : «Tout Etat ou territoire douanier ayant une autonomie totale dans la conduite de sa politique commerciale est éligible pour accéder à l’OMC aux conditions convenues entre ce dernier et les membres de l’OMC. » (article XII de l’accord de l’OMC)

Au moment où il s’est vu reconnaître le statut de pays observateur, qui, selon le directeur général Supachai Panitchpakdi, constitue le premier pas vers l’accession à l’état de membre à part entière (4), l’Irak était toujours dirigé par l’Autorité provisoire de coalition (ACP) sous la houlette de Paul Bremer.

Mais ce fait n’a pas entamé la détermination américaine de faire de l’Irak un membre à part entière de l’institution multilatérale. Le 30 septembre 2004, le pays a soumis sa requête auprès du directeur général de l’OMC. Avant la fin de l’année, lors du conseil général de l’OMC de décembre, une commission a été mise en place pour examiner le dossier de candidature irakien. L’Irak a également commencé à rédiger un memorandum sur le régime du commerce extérieur et a mis en place un comité national pour l’adhésion à l’OMC, ce qui correspond au 3e degré du processus d’adhésion. Le second pas avait été franchi et le 3e était en bonne voie. Et pour s’assurer que l’Irak resterait dans la voie de l’accession, les USA ont généreusement offert leur aide aux Irakiens pour se préparer aux négociations. « Le gouvernement américain soutient les efforts du gouvernement par intérim. A cette fin, nous avons invité une équipe de hauts responsables et d’experts aux USA avec qui nous discuterons de questions liées au commerce, y compris les négociations en vue de l’adhésion à l’OMC. » (5)

Chronologie
19 mars 2003 – Invasion de l’Irak par les USA
11 février 2004 – L’Irak acquiert le statut d’observateur au sein de l’OMC
28 juin 2004 – Les USA accordent la «souveraineté» au gouvernement irakien  par intérim
13 décembre 2004 – Le Conseil général de l’OMC met en place des groupes de travail pour examiner la candidature irakienne. L’Irak commence la rédaction d’un Mémorandum sur le régime du commerce extérieur et crée une commission nationale pour l’adhésion à l’OMC
30 janvier 2005 – Elections nationales en Irak
septembre  2005 – L’Irak soumet un Mémorandum sur le régime du commerce extérieur.

Rites d’initiation

Mais que signifie exactement le processus d’adhésion d’un pays à l’OMC ? Comme toute accession à un club très fermé, le processus est très secret. Selon Jane Kelsey, qui a consacré de nombreux écrits à l’adhésion des îles du Pacifique à l’OMC : « Le processus d’adhésion n’a pas de règles sauf celles du précédent et du pouvoir, en contradiction totale avec les déclarations publiques de ses membres concernant le propos et le but de l’OMC. » (6)
L’ensemble du processus est entouré de mystère et les documents soumis au groupe de travail pour l’adhésion restent d’un accès restreint tant que les négociations ne sont pas achevées. Dans de nombreux cas, les parlementaires et les citoyens du pays demandeur ne connaissent pas les enjeux.

Le processus d’adhésion oblige le pays candidat à faire des concessions aux membres les plus puissants de l’OMC et à changer ses règles intérieures et extérieures pour se conformer aux nouveaux accords. Dans le cas de Samoa, le groupe de travail de l’OMC a exigé des concessions que l’île ne pouvait tout simplement pas se permettre. « Ils peuvent demander toutes sortes d’engagements que Samoa n’est pas en position de tenir. S’ils insistent, il y a deux options : ou nous cédons, ou nous ne deviendons jamais membre de l’organisation. » (7)
En effet : l’adhésion à l’OMC est le résultat d’une négociation. L’article XII de l’accord de l’OMC stipule que l’adhésion à l’OMC se fera « à des conditions sur lesquelles le gouvernement demandeur et l’OMC sont d’accord. » (8) Ce qui veut dire que ces « conditions » peuvent relever d’une liste illimitée allant au-delà des engagements ou des négociations actuels au sein de l’OMC. Selon J. Kelsey : « Il est important de reconnaître que ce que rejette le Sud [lors du round de Doha] a déjà été rendu obligatoire, de façon arrogante et invisible, pour les pays les plus petits, les plus pauvres et les plus vulnérables. » (9)

Les pays membres qui font partie des groupes de travail concernant l’accession peuvent malmener le candidat à leur gré. Toutes les concessions qu’ils en obtiennent s’appliquent aux autres pays aux termes de la politique non-discriminatoire de l’OMC. Ces négociations couvrent tous les domaines, des droits de douane jusqu’àux politiques concernant les biens et less services. En ce qui concerne l’Irak, il faut s’attendre à ce que les USA mènent les négociations puisqu’ils ont manifesté un très grand intérêt à ce que ce pays rejoigne l’organisation multilatérale.

En fait, depuis le début, les USA ont planifié l’entrée de l’Irak dans l’OMC et la reconstruction du pays a été orientée pour le rendre apte à cette entrée. Selon un chercheur, les Américains ont demandé à Bearing Point, l’entreprise chargée de la reconstruction économique de l’Irak, de « créer un cadre légal d’investissement et de commerce, compatible avec l’OMC, et qui œuvrera en faveur du développement concurrentiel …et qui constituera une base pour une intégration poussée dans les réseaux financiers et commerciaux internationaux. » (10) Ce qui veut dire que les lois irakiennes devront être réécrites pour devenir compatibles avec l’OMC et transformer l’économie planifiée irakienne en une économie de marché centrée sur le commerce international.

P. Bremer s’est aussi assuré que l’Irak deviendrait membre de l’OMC. Le décret 12 dit « Politique de libéralisation du commerce » est l’un des infâmes décrets Bremer qui ont transformé l’économie irakienne d’un trait de plume . Cet ordre de libéralisation commerciale a donné jusqu’à février 2004 pour rejoindre l’OMC et in fine, c’est à cette date que l’Irak a reçu son statut d’observateur au sein de l’OMC à la suite d’un vote unanime.

P. Bremer s’est également assuré qu’il ne faudrait rien moins qu’un miracle pour effacer ses ordres même si le gouvernement provisoire a cessé ses activités : « Les décrets Bremer resteront, leur abolition serait quasiment impossible, car elle nécessiterait l’approbation d’une partie de la future Assemblée comprise entre les deux-tiers et les trois-quarts. » (11)

Pour certains pays, l’adhésion à l’OMC a pris des années, mais l’Irak a pris la voie express qui l’a vu passer en un rien de temps du statut d’observateur à la rédaction d’un memorandum qui constitue le point de départ des négociations intensives en vue de l’adhésion..

Tout ceci fait partie du grand dessein américain pour l’Irak. La raison évidente pour laquelle les USA ont mis le paquet pour imposer l’adhésion irakienne est le verrouillage de la transformation économique du pays avec ses engagements auprès de l’OMC, tout comme les décrets Bremer ont été gravés dans le marbre de la législation irakienne. En inscrivant ces faits dans une perspective internationale, les USA interdisent tout changement de politique par tout futur gouvernement irakien. Non seulement ils limitent, mais ils enlèvent toute possibilité à un futur gouvernement d’introduire des politiques ou des lois d’intérêt public.

Comment devenir membre de l’OMC en 8 étapes faciles

1) Obtenir le statut d’observateur au sein de l’OMC

2) Demander l’adhésion. Le processus d’adhésion commence par la soumission d’une demande formelle par le gouvernement demandeur. Cette requête est examinée par le Conseil général qui met en place une commission pour examiner cette demande et qui soumet les conclusions de la commission au Conseil général pour approbation. La commission est ouverte à tous les pays membres de l’OMC.

3) Soumission d’un memorandum sur le régime du commerce exérieur. Le gouvernement demandeur présente devant la commission un memorandum qui couvre tous les aspects de son régime légal et commercial. Ce document constitue la base d’une enquête poussée menée par la commission.

4) Remplir les conditions d’adhésion. Les conditions incluent l’engagement de souscrire aux règles de l’OMC relatives à l’adhésion et aux périodes transitoires requises par tout changement structurel ou législatif nécessité par cet engagement.

5) Négociations bilatérales. «Le gouvernement demandeur commence des négociations bilatérales avec les membres de la commission intéressés par des concessions et des engagements concernant l’accès au marché des biens et des services. Les résultats de ces négociations sont materialises dans un document qui fait partie de la série de mesures liées à l’accession définitive.

6) Série de mesures liées à l’accession définitive. La commission finalise les conditions de l’accession qui consistent en un rapport, une proposition de traité d’adhésion (le”protocole d’adhésion”) et la liste (le “programme”) des engagements du futur état membre

7) Approbation de la série de mesures. Les mesures finales, inscrites dans le rapport, le protocole et le programme des engagements, sont présentées devant le Conseil général de l’OMC ou la Conférence ministérielle. Si les deux-tiers des membres de l’OMC votent en sa faveur, le candidat est libre de signer le protocole et d’adhérer à l’organisation. Dans de nombreux  cas, le parlement du pays ou la législature doit ratifier l’accord avant que le pays ne rejoigne les rangs de l’OMC.

8) Adhesion finale. 30 jours après que le gouvernement candidat a notifié au Secrétariat de l’OMC qu’il a effectué la procédure de ratification, il devient membre à part entière. (12)

La liberté du commerce, un cadeau…

Dans le même temps, les USA n’ont cessé de donner l’image d’un occupant bienveillant qui aidait généreusement les Irakiens à accéder au libre échange et à la démocratie. M. Al-Mukhtar déclare que l’adhésion de l’Irak à l’OMC constitue un premier pas en vue de son intégration dans les échanges économiques mondiaux : « Après des décennies d’isolation, l’Irak commence à rejoindre la communauté internationale et votre décision envoie au peuple irakien  le signal positif qu’il est accueilli et que le monde a son bien-être. à cœur » (13)
Les partisans du libre-échange ont salué cette déclaration comme une bénédiction pour des pays comme l’Irak. Ainsi Daniel Griswold du Cato Institute (groupe de réflexion libéral) de Washington qui déclare : « Quel est le point commun entre la Lybie, le Soudan, la Syrie, l’Irak, l’Iran et l’Afghanistan ? Tous soutiennent et ont soutenu le terrorisme, aucun n’est membre de l’OMC. » (14)

Les USA n’en sont pas restés là et ont défini un plan semblable à celui de l’Irak pour toute la région. « L’accord de libre-échange pour le Moyen-Orient (l’ALEMO) a été défini comme une partie d’un plan destiné à combattre le terrorisme, soutenu par le développement de la prospérité et de la démocratie au Moyen-Orient au moyen du commerce. » (14)  écrit un analyste du service recherche du Congrès américain. Et le premier pas vers l’ALEMO consiste à rejoindre les rangs de l’OMC.
 
…empoisonné

Quelle est la raison de cette pression visant à l’intégration de l’OMC par l’Irak, puis par d’autres pays de la zone moyen-orientale ? Les Américains disent qu’il s’agit de combattre le terrorisme, mais oublient de préciser les avantages qu’eux-mêmes et leurs compagnies en retirent.

 Leur but a toujours été le pétrole : « Les USA devraient dépendre de pays étrangers pour leur approvisionnement en pétrole à 70% en 2025, il faut donc s’assurer de l’accès au pétrole, c’est une question de survie et une source majeure de pouvoir » (15). S’assurer du contrôle signifie changer le système actuel où 70% du pétrole mondial est aux mains de sociétés nationales.
Comme l’explique un analyste américain, l’un des dogmes de l’administration Bush consiste à consolider le contrôle des services mondiaux énergétiques, et le principal moyen d’y parvenir passe par les négociations sur les services au sein de l’OMC (16).

L’OMC demeure le meilleur terrain  à cause de ses accords ayant force de loi et les USA s’approchent de leur but dès lors que l’Irak devient membre de l’OMC. Comme le déclare le Vice-président américain, Dick Cheney : « De nombreuses zones offrent de grandes opportunités en matière de pétrole, mais le Moyen-Orient, qui concentre les deux-tiers des réserves et qui a les coûts de production les plus bas, demeure la cible.privilégiée » (17)
Les gagnants seront les géants américains du pétrole, qui n’ont pas attendu l’invasion du pays pour surveiller de près ses immenses réserves pétrolières. Selon un rapport récent de Global Exchange : « Des contrats d’un montant en milliards de dollars ont été accordés à des multinationales liées à l’administration Bush, comme Halliburton, Bechtel and Harken Energy Company, pour des services comme l’extraction et la commercialisation de l’or noir. » (18) Toujours selon ce rapport, les services liés au pétrole sont plus profitables que le pétrole lui-même.

A l’ordre du jour : les services liés à l’énergie

Par le biais de l’ALENA (Accord de libre échange de l’Amérique du Nord), les USA ont réussi à supprimer le contrôle du Canada sur ses vastes ressources énergétiques grâce, entre autres, aux mesures suivantes (19) :
– en instituant le droit des sociétés étrangères d’investir dans le secteur de l’émergie
– en enlevant au Conseil national de l’énergie canadien (Canada’s National Energy Board) ses pouvoirs et en démantelant la « clause de sauvegarde de l’approvisionnement vital » qui demandait au Canada de garantir l’équivalent de 25 années de surplus de gaz (les USA ont maintenu leurs 25 ans pour des raisons de sécurité)
– en interdisant les taxes à l’exportation qui constituent une source importante de revenus pour un gouvernement.

Mais l’ALENA ne s’applique qu’au Mexique, au Canada et aux USA. Les USA ont donc proposé d’ouvrir les négociations à l’OMC sur les services au secteur énergétique : « Les USA demandent aux membres de l’OMC d’ouvrir les marchés éligibles pour des prises de participation à toute la gamme des services liés à l’énergie, de l’exploitation jusqu’à la distribution au consommateur… » (20)

Le plan consiste à forcer l’accès du secteur des services liés à l’énergie et à  faire passer le contrôle sur le pétrole des gouvernements aux multinationales du secteur. Selon Victor Menotti, de l’International Forum on Globalization,  « Si la Maison Blanche réussit son coup quant aux négociations sur les services liés à l’énergie, le contrôle des ressources énergétiques primaires mondiales passera des mains des gouvernements nationaux aux géants des services comme Halliburton. » (21).

Lors de la 6e conférence ministérielle de l’OMC qui s’est récemment tenue, les USA et leurs alliés ont réussi à élargir les négociations sur les services pour y inclure les services liés à l’énergie, qui couvrent toutes les activités du secteur, tous les modes d’approvisionnement et toute la gamme des activités liées au pétrole et au gaz, de l’exploration aux services liés à l’exploitation, aux tests techniques, à l’analyse et au raffinement. (22)

Aux termes du nouveau mandat sur les services, il y aura des négociations multilatérales sur des secteurs variés, parmi lesquels l’énergie, qui ouvriront ces services à la privatisation et au contrôle par des sociétés privées.

Inverser la tendance

La situation actuelle semble verrouillée. Le grand plan américain pour l’Irak et son pétrole se concrétise : l’Irak deviendra bientôt membre de l’OMC et les services liés à l’énergie ont été inclus dans le mandat de l’OMC. Les Américains n’ont plus qu’à compter les jours qui les séparent de la prise de contrôle du pétrole irakien par leurs sociétés, avant de s’attaquer au reste des réserves mondiales.

Néanmoins, tant que la résistance intérieure irakienne augmente et que les mouvements anti-guerre et altermondialistes maintiennent la pression au niveau international, il reste un espoir de renverser la vapeur.

L’adhésion de l’Irak est bien engagée mais elle n’est pas achevée. On devrait pouvoir remettre en cause la légitimité de tout le processus puisque les Irakiens n’ont pas recouvré leur autonomie et encore moins leur politique commerciale. Le processus d’adhésion a commencé avant la tenue des élections et, bien qu’il y ait un nouveau gouvernement irakien, sa légitimité et son autonomie sont contestables car le pays est toujours sous occupation américaine. Le statut d’observateur a été accordé à un pays encore gouverné par une coalition provisoire. Le ministre qui a conduit le processus d’adhésion a été choisi par les USA et le pays était effectivement occupé lorsqu’il a entrepris des démarches en vue d’adhérer à l’OMC
Les USA, comme tout autre force d’occupation, n’ont pas le droit de déterminer et d’appliquer une nouvelle politique et une nouvelle législation. Comme le font remarquer nombre de juristes, en changeant la politique économique irakienne, les USA ont violé le droit international. L’article 43 de la convention de La Haye de 1907 stipule que « L’autorité du pouvoir légitime étant passée aux mains de l’occupant, ce dernier prendra toutes les mesures en son pouvoir pour restaurer et assurer l’ordre public et la sécurité tout en respectant autant que faire se peut, et sauf en cas d’absolue nécessité, les lois en vigueur dans le pays. » Ce qui veut dire que les USA n’ont pas le droit de restructurer l’économie irakienne pour la rendre compatible avec l’OMC. L’Attorney General du Royaume-Uni lui-même, Lord Peter Goldsmith, a signalé au premier ministre anglais Tony Blair que « [selon lui] l’imposition de réformes économiques structurelles majeures n’est pas autorisée aux termes du droit international. » (23)

L’adhésion de l’Irak à l’OMC doit être arrêtée. Seul un gouvernement légitime et réellement souverain devrait déterminer l’avenir du pays.

L’occupation de l’Irak comporte des aspects économiques et militaires. Même si les mouvements de résistance des peuples irakiens réussissent à arrêter l’occupation et à chasser les forces américaines, les USA et leurs alliés sont quand même en mesure de restructurer l’économie irakienne et de faire adhérer le pays à l’OMC, ce qui leur permettrait de continuer à exploiter et à contrôler les ressources irakiennes.

Si l’occupation de l’Irak doit cesser et si le droit à l’auto-détermination doit être rendu à son peuple, les liens entre les intérêts militaires et économiques doivent être établis et des campagnes doivent être menées à ces deux niveaux.

* Marylou Malig est la coordinatrice de la campagne sur le commerce au sein de Focus on the Global South. [email protected]

NOTES
1. BRIDGES Weekly Trade News Digest Vol 8, Number 35, Iraq  Seeks WTO Membership, 20 October 2004.(L’Irak veut faire partie de l’OMC)
2. Lubetkin, Wendy, “Iraq granted observer status at the WTO.”  2005.(L’Irak obtient le statut d’observateur à l’OMC)
3. BBC News. “Iraq granted WTO observer status” 11 February  2004 .(L’Irak obtient le statut d’observateur à l’OMC).
4. “Iraq took the first step towards joining the 148-member  organization when the General Council approved Iraq’s request for  observer status on 11 February 2004.” (L’Irak franchit la première marche pour rejoindre l’organisation aux 148 membres : l’Assemblée Générale de l’OMC accepte la demande irakienne pour le statut d’observateur )BRIDGES Weekly Trade News Digest Vol 8, Number 35, Iraq Seeks WTO Membership, .(L’Irak veut faire partie de l’OMC) 20 October 2004.
5. BRIDGES Weekly Trade News Digest Vol 8, Number 35, Iraq Seeks WTO Membership, .(L’Irak veut faire partie de l’OMC) 20 October 2004.
6. Kelsey, Jane. Acceding countries as pawns in a power play: A case study of the Pacific Islands (.Des pions sur l’échiquier du pouvoir, étude de cas sur les pays qui demandent l’adhésion : les îles du Pacifique) Focus on Trade No. 103, August 2004.
7. Interview de Tuala Falani Chan Tung, Sunline, April 2004. quoted in Kelsey, Jane. Acceding countries as pawns in a power play: A case study of the Pacific Islands. (.Des pions sur l’échiquier du pouvoir, étude de cas sur les pays qui demandent l’adhésion : les îles du Pacifique) Focus on Trade No. 103, August 2004.
8. Kelsey, Jane. Acceding countries as pawns in a power play: A case study of the Pacific Islands (.Des pions sur l’échiquier du pouvoir, étude de cas sur les pays qui demandent l’adhésion : les îles du Pacifique). Focus on Trade No. 103, August 2004
9. Docena, Herbert. “Shock and Awe” Therapy: How the United States is attempting to control Iraq’s oil and pry open its economy. Presentation at the World Tribunal on Iraq, (La thérapie par le choc et la terreur. Les Etats-Unis veulent contrôler le pétrole de l’Irak et  investir son économie. Exposé au Tribunal Mondial sur l’Irak) June 2005.
10. Docena, Herbert. “Shock and Awe” Therapy: How the United States is attempting to control Iraq’s oil and pry open its economy. Presentation at the World Tribunal on Iraq, (La thérapie par le choc et la terreur. Les Etats-Unis veulent contrôler le pétrole de l’Irak et  investir son économie. Exposé au Tribunal Mondial sur l’Irak) June 2005.
11. Speech by Mr. Ahmad Al-Mukhtar, Director General of Foreign  Economic Relations, Iraq Ministry of Trade, to the General Council of the World Trade Organisation (Discours de M. Ahmad Al-Mukhtar, Directeur Général des relations économiques extérieures, Ministère Irakien du Commerce, à l’Assemblée Générale de l’OMC) 11 February
12. WTO, www.wto.org
13. Griswold, Daniel. Can Free Trade Promote Peace in the Middle East? Capitol Hill Forum, (Le libre échange peut-il favoriser la paix au Proche-Orient ?) 20 June 2003.
14. Boelle, Mary Jane. Middle East Free Trade Area: Progress  Report. (Rapport sur la zone du libre échange au Proche-Orient)CRS Report for Congress, February 8, 2005.
15. Docena, Herbert. “Shock and Awe” Therapy: How the United States is attempting to control Iraq’s oil and pry open its economy. Presentation at the World Tribunal on Iraq (La thérapie par le choc et la terreur. Les Etats-Unis veulent contrôler le pétrole de l’Irak et  investir son économie. Exposé au Tribunal Mondial sur l’Irak), June 2005.
16. No Iraq-ification of the World: Oil out of the WTO (Non à l’irakisation du monde : pas de pétrole à l’OMC). Global Exchange. 2005
17. Docena, Herbert. “Shock and Awe” Therapy: How the United States is attempting to control Iraq’s oil and pry open its economy. Presentation at the World Tribunal on Iraq (La thérapie par le choc et la terreur. Les Etats-Unis veulent contrôler le pétrole de l’Irak et  investir son économie. Exposé au Tribunal Mondial sur l’Irak), June 2005.
18. No Iraq-ification of the World: Oil out of the WTO. (Non à l’irakisation du monde : pas de pétrole à l’OMC) Global Exchange. 2005
19. La liste complète des mesures de l’ALENA se trouve sur IFG Special Report “The Free Trade Area of the Americas”(La zone de libre-échange des Amériques) par Maude Barlow. Cit. in Menotti, Victor. The WTO and Oil. International Forum on Globalization. October 2004.
20. Menotti, Victor. The WTO and Oil. International Forum on Globalization. October 2004.
21. Menotti, Victor. The WTO and Oil. International Forum on Globalization. October 2004.
22. JOB(05)/237/Rev.2 Sectoral and Modal Objectives as Identified by Members, Council for Trade in Services Special Session, 17 November 2005. 
23. Déclaration d’un memo officieux daté du 26 mars 2003. Cit. in Press Release Economic Occupation of Iraq on Trial, 22 August 2005.

Traduction : Bénédicte Coste et Jean-Pierre Renard, Coorditrad.